L’Alliance progressiste s’engage à surveiller de près la situation en Malaisie dans ses préparations des élections générales de 2018
Il existe de nombreux obstacles à des élections libres et justes.
- Le manque d’impartialité de la commission électorale
La commission électorale (CE) est l’organe constitutionnel chargé de gérer le très important système électoral en Malaisie, comme prévu par l’Article 114 de la Constitution fédérale, qui lui demande de gagner et d’inspirer la confiance au peuple.
Toutefois, ses actions en 2017 ont montré qu’elle n’est pas impartiale et différentes activités et décisions dans la même année ont en fait encore contribué à une détérioration du système électoral.
- Passage en force du processus de redélimitation des circonscriptions
- Destruction des données d’enregistrement d’électeurs
- Complicité pour l’enregistrement et le transfert d’électeurs fantômes
- Refus de fournir des données électroniques concernant le projet de liste électorale supplémentaire
- Augmentation des catégories de vote par correspondance hautement susceptible de fraude
- Enregistrement et transfert secrets d’électeurs militaires
- Processus d’enregistrement beaucoup plus difficile des électeurs
Voilà pourquoi il n’est pas étonnant que la Malaisie ait obtenu une note « très basse », finissant à la 144è place sur 161 pays dans le Projet d’intégrité électorale, une étude universitaire indépendante très respectable sur l’intégrité électorale dans le monde, basée à l’Université de Harvard et l’université de Sydney.
Ce à quoi nous assistons depuis 2017 est une dégradation planifiée du système électoral en Malaisie, utilisant d’anciennes comme de nouvelles techniques. La fraude et la manipulation électorales sont déjà en cours, bien avant les élections, et le CE est au cœur de toute l’opération.
- Manipulation/découpage inégal des circonscriptions électorales
Il existe une tendance bien documentée pour le découpage arbitraire électoral, dans laquelle des allégeances politiques et des ethnicités prévues sont manipulées pour conférer un avantage au parti au pouvoir.
Des circonscriptions en grande partie non-malaisiennes, dirigées par l’opposition, semblent grandir de plus en plus, tandis que les circonscriptions dirigées par le parti au gouvernement restent petites. Selon les rapports, il existe des projets pour créer 13 « super circonscriptions » avec plus 100 000 électeurs chacune, généralement dans des zones dirigées par l’opposition.
À Damansara, une circonscription dirigée par l’opposition, le découpage électoral a atteint de nouveaux sommets avec une méga-circonscription comprenant plus de 150 000 électeurs. Ainsi, un seul électeur à Putrajaya, qui ne compte pas plus de 18 000 électeurs, aurait à présent autant de poids que huit électeurs à Damansara.
Cela signifie que de nombreux malaisiens, notamment les sympathisants de l’opposition et d’autres minorités, sont progressivement privés de leurs droits puisque leurs voix comptent de moins en moins avec chaque nouvelle délimitation des circonscriptions.
Il n’est donc pas surprenant que, compte tenu de ce genre de découpage inégal, Umno-BN a été en mesure de conserver une majorité de sièges au Parlement, alors même qu’il avait perdu le vote populaire lors des dernières élections.
On peut toutefois se demander si des élections libres et justes sont possibles avec un système électoral aussi manifestement partial et truqué.
- Atteintes aux droits de l’Homme
Des groupes de défense des droits de l’homme et des ONG internationales, tout comme Human Rights Watch (HRW) dans son rapport mondial de 2018, ont constaté quelques infractions choquantes et même des retours en arrière au niveau des droits de l’Homme en Malaisie. Nous sommes également très inquiets au vu des cas de brutalité policière, donnant lieu à des blessures voire des décès dans les prisons, alors que les membres des forces de la police jouissent d’une totale impunité et ne sont pas tenus pour responsables pour de telles allégations parmi de nombreuses autres.
La liberté de réunion et d’association des citoyens malaisiens continue d’être bafouée par un abus de pouvoir exécutif flagrant de la part du régime en place. Les militants, artistes, personnalités politiques, citoyens non-affiliés continuent d’être arrêtés, accusés et reconnus coupables selon des lois draconiennes. Et pendant ce temps, le statut légal est refusé aux partis politiques de l’opposition en fonction du bon vouloir fantaisiste du régime en place.
- Inégalités croissantes
Selon l’économiste et spécialiste de l’inégalité Dr Muhammed Abdul Khalid, l’inégalité est en hausse chez les malaisiens, et ce malgré la croissance économique attrayante de la Malaisie d’un point de vue extérieur. En raison des politiques fiscales et de l’emploi du régime au pouvoir, qui bénéficient largement aux détenteurs de capitaux plus qu’aux travailleurs moyens, l’inégalité dans les actifs et les salaires est en hausse. En termes de coûts et d’avantages, l’économie malaisienne est une économie où les bénéfices sont monopolisés par les « rares » personnes riches et puissantes au sein de la société, tandis que les coûts pour supporter l’économie sont portés par les « nombreuses » personnes qui luttent et travaillent.
Malgré les protestations verbales des législateurs et autres personnes qui critiquent haut et fort cette « économie à deux vitesses », le régime au pouvoir semble vouloir poursuivre sa trajectoire politique et ne montre aucun signe de correction vers une voie plus inclusive et juste pour les Malaisiens.
- Aggravation de la corruption
L’indice de perception de la corruption (CPI) reconnu dans le monde entier de Transparency International a fait état d’une dégradation dramatique du problème de la Malaisie en matière de corruption, selon des sondages parmi les entrepreneurs, les analystes de risque et le peuple malaisien en général. La Malaisie a chuté de sept points par rapport à l’année dernière et se retrouve à la 62è place sur 180 pays, sa plus mauvaise performance au cours des cinq dernières années. L’un des principaux facteurs pour cette chute dramatique dans le classement a été le scandale financier à l’échelle mondiale, impliquant 1Malaysia Development Berhad (1MDB), un fonds souverain mis en place par l’actuel premier ministre.
L’historique du CPI annuel sur 23 ans de 1995 à 2017 montre que la Malaisie stagne et a même régressé en matière d’intégrité et de principes de responsabilité et de bonne gouvernance au cours des deux dernières décennies, comparée à certains pays comme la Chine et l’Indonésie, qui ont largement amélioré leur système en fournissant des efforts continus. Ceci montre bien que les différentes initiatives des régimes au pouvoir pour combattre la corruption se sont uniquement traduites par une corruption encore pire, due aux problèmes structurels et intégraux engendrés par la politique de patronage du régime au pouvoir.